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Comment déjouer les pentes des greens ?
La routine de putting que je vais détailler va paraître interminable ! Mais pas de panique il suffit de quelques secondes pour la réaliser. Souvenons-nous, sur le green le premier qui joue à droit à 40 secondes de préparation. Les suivants bénéficient du temps d’installation et de jeu de tous les précédents.
Et puis l’observation du green commence pendant l’approche. C’est à 50 mètres que l’on en perçoit le mieux la pente générale.
Rien de neuf sous le soleil
Ce qui est contenu dans cet article n’est pas nouveau. En 1984 le colonel H.A. Templeton pilote d’essai de l’US Air Force faisait paraître un livre, « Vector Putting the Art and Science of Reading Greens » qui présentait tous les concepts que vous allez retrouver. Diverses écoles de putting se sont inspirées de ces notions, les ont intégrées dans leurs méthodes, et pour être juste, les ont rendues plus maniables.Templeton était un précurseur. Il a inventé un logiciel de simulation de putt 3D pour les émissions de télévision en réseau en 1988. Aujourd’hui Templeton est oublié, je n’ai même pas pu retrouver ses prénoms exacts sur internet.
C’est parti, la balle est sur le green, nous sommes putter en main.
Au putting nous n’avons que 3 paramètres à prendre en compte :
- la ligne de putt.
- l’alignement de la face de club,
- la vitesse de la balle.
Notre routine doit donc nous permettre :
- de visualiser la ligne de putt. C’est à dire la ligne que devra suivre la balle pour finir dans le trou.
- d’aligner la face du putter pour que la balle adopte cette ligne,
- d’évaluer la vitesse à donner à la balle pour qu’elle reste sur cette ligne et entre dans le trou.
La ligne de putt
Pour déterminer notre ligne de putt avec un minimum de précision nous avons besoin de réaliser une petite construction géométrique virtuelle et pour cela connaître 2 choses : la ligne de chute du trou et la ligne de base de la balle.
1 – Déterminer la ligne de chute du trou
La ligne de chute ou ligne de putt droit matérialise la ligne droite qui passe par le centre du trou et qui n’a pas de dévers ni à droite ni à gauche. Autrement dit sur cette ligne « c’est tout droit ».
Sur l’image ci-contre où le CD représente le green et le trou central la coupe, la flèche noire matérialise la ligne de chute du trou.
2 – Construire l’horloge
Cette horloge est virtuelle. Midi est sur la ligne de chute au dessus du trou, 6 heures est à l’opposé au dessous du trou, toujours sur la ligne de chute.
Le diamètre 3h – 9h est important. Si la balle est dans la zone qui se situe au dessus, le putt est descendant, si elle repose dans la zone au dessous le putt est montant.
3 – Déterminer la ligne de base de la balle
C’est à dire la ligne droite qui va de la balle au trou. Elle coupe la ligne de chute du trou au centre de celui-ci.
Notre ligne de putt se situe toujours au dessus de la ligne de base de la balle. Jamais au dessous sous peine de passer loin sous le trou.
La balle ne peut entrer dans le trou que dans l’arc de cercle situé au dessus de la ligne de base, entre celle-ci et la ligne de chute du trou. Très prés de la ligne de chute pour les putts descendants, au raz de la ligne 9h-3h pour les putts montants.
Cela dit nous avons tous passé des putts par la « fenêtre de la cuisine », une entrée théoriquement très improbable !
Cas rare la balle est sur la ligne de chute : les trois lignes, ligne de base, ligne de chute et ligne de putt se confondent. Il faut jouer tout droit sur le trou !
Alignement de la face du putter
Déterminer le trou virtuel
Il existe sur la ligne de chute, au dessus du trou, un point tel que tous les putts effectués vers lui à la bonne vitesse vont entrer dans la coupe ! En jouant vers ce point, comme si nous voulions l’atteindre, la balle sous l’effet de la gravité va décrire la parabole ( ligne de putt) qui la conduit dans la coupe.
Ce point porte divers noms : Aim-Spot ; Aim-Point; point d’évaporation; certains l’appellent même le point-G (pourquoi pas voir ici). En français aimpoint se traduit par point de visée. Je ferai soft et l’appellerai le trou virtuel !
Evidemment plus la ligne de chute est abrupte, plus le trou virtuel sera éloigné au dessus du trou réel.
Sur l’image ci-contre, le trou virtuel se situe sur la ligne de chute (axe 12h-6h de l’horloge) à l’endroit où convergent les flèches rouges. Remarquons qu’il n’est pas réellement ponctuel. C’est plus une zone qu’un point.
Cet autre croquis venu du site PuttingZone est plus explicite.
Le trou virtuel est matérialisé : Aim Spot. Il est beaucoup plus gros que le trou réel ! Nous voyons la balle en haut à droite et le putter bien aligné sur la ligne Aim. La ligne de putt ou Putt Path est au dessous de la ligne Aim mais bien au dessus de la ligne de base qui va de la balle au trou et qui n’est pas représentée ici.
Utiliser une méthode intuitive
C’est bien beau tout ça mais comment savoir précisément où est ce trou virtuel ? J’ai insisté sur le fait qu’il n’était pas ponctuel.
Pour trouver ce point « magique » (rien n’est vraiment magique), nous pouvons compter sur notre cerveau.
Le schéma ci-dessous, venu du site PuttingZone de Geoff Mangum, nous explique comment faire travailler notre cerveau.
Nous retrouvons la ligne de chute (Fall-line), la ligne de base (Baseline) qui va de la balle au trou (Cup).
Nous sommes sur un putt montant, la balle est sous la ligne 9h-3h de l’horloge (non représentée ici).
En bleu nous voyons toutes les balles qui vont traverser la ligne de base et finir sous le trou, même celle qui est trop longue.
En rouge nous avons toutes les balles trop hautes qui vont rester au dessus du trou.
En vert figurent toutes les balles qui auraient pu rentrer. Une est trop courte, une est trop longue, une seule entre dans la coupe.
Maintenant intéressons nous aux trois lignes pointillées. Elles sont la base de la méthode intuitive.
Si nous orientons la face de notre putter dans le sens de la ligne pointillée bleue notée « Lo » nous obtenons les balles en bleu qui passent sous la ligne de base.
Si nous orientons la face de notre putter dans le sens de la ligne pointillée rouge notée « Hi », nous obtenons les balles en rouge qui restent hautes.
Notre seule chance de rentrer est d’orienter notre face de putter selon la ligne pointillée verte notée « Right Aim ».
Le trou virtuel, qui n’est pas positionné ici, se trouve à l’intersection de la ligne de visée verte et de la ligne de chute.
D’une manière pratique et rapide il faut simuler trois putts depuis l’emplacement de notre balle :
1 – un selon une ligne qui manifestement va faire passer la balle sous la ligne de base.
2 – un selon une ligne qui de toute évidence va envoyer la balle trop haut au dessus du trou.
3 – la vérité est quelque part entre les deux. Laissons notre cerveau faire une prédiction. Testons là en simulant un putt, il y a de fortes chances qu’elle soit bonne.
Mais le travail n’est pas terminé, il reste à régler la vitesse de la balle
Régler la vitesse de la balle au putting
Là encore nous devons faire confiance à notre cerveau.
Le schéma ci-dessus nous donne deux consignes dans les textes de droite :
1 – putter comme si nous voulions aller aussi loin que la ligne de chute, mais pas plus loin (ni trop court, ni trop long).
Donc nous voulons donner à notre balle assez de vitesse pour atteindre le trou virtuel. Voilà pourquoi je préfère l’appeler trou virtuel plutôt que point de visée. Il n’est pas simplement notre point de visée, il est notre objectif théorique de jeu.
2 – putter comme si nous voulions entrer dans le trou virtuel, au dessus du trou réel pour éviter que la balle ne coule du côté bas.
Attention nous amateurs sommes souvent, très souvent, trop bas et passons dessous. Soit nous avons mal évalué l’emplacement du trou virtuel, soit nous ne voulons pas admettre qu’il est à ce point au dessus du trou réel.
Nous pouvons pratiquer une approche intuitive en simulant trois putts dans la ligne que nous avons déterminée précédemment :
– un qui sera manifestement trop court pour répondre aux deux consignes;
– un qui sera trop long;
– la vérité est encore entre les deux. Laissons notre cerveau choisir !
Si nous donnons à la balle la bonne vitesse pour atteindre le trou virtuel, il ne reste plus qu’à laisser agir la gravité, la balle va entrer dans le trou réel.
Et maintenant la routine
1 – En approchant du green j’étudie sa configuration. J’ai aussitôt une idée du sens de la ligne de chute.
2 – Sur le green je marque ma balle, je la relève et je la nettoie ;
3 – Je fais le tour du trou à la recherche de la ligne de chute. Je la visualise. Je trace mentalement la ligne 9h-3h. Si ma balle est au dessus j’ai un putt descendant, si elle est au dessous j’ai un putt montant ;
4 – Je reviens à ma marque. Je visualise la ligne de base de la balle ;
5 – Je sais que je dois tout faire pour que ma balle ne passe pas sous la ligne de base ;
6 – Je simule trois putts sur trois lignes d’alignement de la face du putter. Mon cerveau me donne la bonne, je prends un repère bien visible devant la marque ;
7 – Je simule trois putts sur cette ligne pour régler l’amplitude de la frappe qui va donner à la balle la bonne vitesse ;
8 – Je pose ma balle ;
9 – Je positionne ma face de club en m’alignant sur le point de repère qui donne la bonne ligne vers le trou virtuel et prend mon stance ;
10 – Je regarde le trou virtuel 4 secondes, dernier réglage pour le cerveau ;
11 – Je frappe. Ben oui, il faut bien y venir !
Si ça ne rentre pas, le putt suivant sera « à donner » !
Pour toute cette préparation il n’a pas fallu plus de 30 secondes.
Gardons les pieds sur terre
– Théoriquement cette approche du putting est cohérente et fonctionne. Pratiquement, dans certains cas il n’est pas très facile de déterminer la ligne de chute. Certains greens sont retords, les architectes ont fort bien travaillé !
– Et il y a des greens très tourmentés sur de courtes distances…
– Ce n’est pas non plus une méthode miracle. Il faut la pratiquer régulièrement sur tous les putts pour entrainer son regard et son cerveau.
– Au delà de 6 mètres les choses deviennent de plus en plus aléatoires. Soyons réalistes, plus on s’éloigne du trou et plus le facteur chance prend de l’importance. Cependant, si la démarche est bien appliquée, la balle ne passera pas loin du trou… Et le second putt sera « donné » !
– Bien sûr les défauts du joueur ne sont pas corrigés par miracle en appliquant cette lecture. Et les coups de poignets sont toujours aussi malheureux. Il reste du travail à faire sur le grip, le stance… Il est tout à fait possible d’être un champion de la lecture des pentes et de rester un pitoyable joueur de putts !
Il existe des formations spécifiques :
Le putting est un compartiment du jeu trop sérieux pour être laissé à l’improvisation. Il faut accepter de consulter un véritable spécialiste et de travailler régulièrement.
Voici deux formations absolument spécifiques putting.
– PuttingZone : En France Laurent Jockschies anime régulièrement des stages et forme des pros qui officient dans les clubs.
Laurent Jockschies a mis sur YouTube quantité de vidéos où il détaille la méthode PuttingZone.
Personnellement j’ai suivi deux formations PuttingZone, dont une avec Laurent Jockschies et je m’en trouve fort bien !
– AimPoint® : En France une dizaine de pros certifiés animent des formations.
Voici le site américain d’AimPoint®
Et une vidéo où Adrien Dubois aborde un aspect de la méthode AimPoint®.
La méthode intuitive n’est pas assez précise ?
Vous vous en doutez certains souhaiteraient une méthode plus rigoureuse ne faisant pas appel à l’intuition. AimPoint® Technology se targue de proposer une méthode complète de putting qui élimine les incertitudes.
Je ne peux pas en juger, je n’ai pas suivi de formation avec un de leurs formateurs et les vidéos mises sur YouTube ne livrent pas le secret prétendument « le mieux garder du golf ».
Il me semble cependant que les joueurs doivent évaluer avec leurs sens la pente en degrés de la ligne de chute. Il reste donc bien une part d’incertitude.
Sur les greens les pentes sont comprises entre 1 et 4°, mais peuvent atteindre 6° à certains endroits. (En % : 1° = 1,75% ; 2°=3,49% ; 3°=5,24% ; 4°=6,99% ; 5°=8,75% ; 6°=10,5%)
Les joueurs professionnels disposent de leur carnet, rempli lors des séances de repérage pendant lesquelles ils utilisent tous les instruments de mesure nécessaires pour déterminer les distances, les pentes, les endroits sûrs etc. Ce carnet très personnel contient toutes les mesures et remarques dont ils auront besoin pendant la compétition. Sur les greens la moindre inclinaison est notée.
Rien ne nous interdit d’en faire autant. Il existe aussi sur internet des sites qui vendent des carnets de parcours. Attention les carnets pour amateurs ont peu d’intérêt. Les carnets pro sont plus rares et plus chers. Ils permettent aussi à chacun d’entrer ses propres données.
Pour ceux qui lisent l’anglais, car bizarrement les auteurs Français ne semblent pas très intéressés par le putting, voici deux textes plutôt théoriques pour aller plus loin :
– un texte ardu pour matheux : The geometry of Putting on a Planar Surface
– un extrait du livre de Templeton sur le site de Geoff Mangum PuttingZone
Une vidéo d’Olivier Raynal (2 min 55) qui explique pourquoi les amateurs échouent souvent à trouver la bonne ligne au putting.
Il n’est plus très à la mode de parler de routine… Certains préfèrent employer setup, soit en français installation. Peu importe, l’appellation ne modifie pas le concept.
L’important reste d’être bien persuadé que pratiquement 100% des coups que nous ratons trouvent leur origine dans une mauvaise préparation.