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Conscience, attention, perception sont au centre de notre dispositif de recueil et de traitement des informations qui vont guider nos actions, y compris sur le parcours. Une étude récente sur la conscience nous éclaire sur les rapports qu’elle entretien avec l’attention et la perception. Chemin faisant nous verrons ce que nous pouvons en retirer pour notre jeu.
Les mécanismes de la conscience
Depuis fort longtemps l’homme se demande si nous percevons le monde qui nous entoure de manière continue ou si notre cerveau fonctionne en recueillant de brefs paquets d’informations sensorielles ?
En avril dernier une équipe de scientifiques Suisses et Allemands publiait une étude proposant un nouveau modèle en deux temps sur la manière dont le cerveau traite l’information pour élaborer la conscience. Précision : les chercheurs n’ont travaillé que sur la perception visuelle.
Dans un premier temps le cerveau traite les détails des objets comme la couleur et la forme pour les analyser inconsciemment à une fréquence très élevée. Dans la deuxième phase le cerveau rend simultanément conscient tous les éléments pour former l’image qu’il présente à notre conscience. Le processus tout entier peut durer jusqu’à 400 millisecondes. Ce décalage relativement important permet au cerveau de nous délivrer l’information la meilleure et la plus claire possible, sans nous encombrer de son travail de décryptage. Au final la conscience n’intervient qu’au terme d’intervalles inconscients, environ toutes les 400 millisecondes.
Cette étude permet d’examiner sous un nouvel angle les rapports existants entre conscience, attention et perception. La question étant de savoir qui choisit les informations que notre cerveau porte à notre conscience : lui ou nous ? Et comment pouvons nous agir sur ce choix ?
Les choix de l’attention
L’attention est la capacité de concentrer volontairement son esprit sur quelque chose de précis. Le mot « volontairement » pourrait répondre aux questions ci-dessus, mais les choses ne sont pas si simples.
Depuis les années 1970 on admet qu’il existe deux types de processus attentionnels, les uns automatiques, les autres conscients. L’attention automatique étant capable de capter simultanément plusieurs évènements, alors que l’attention consciente ne peut traiter les évènements que successivement.
Nos yeux et nos oreilles perçoivent donc quantité d’informations mais toutes ne sont pas portées à notre conscience.
Est-ce à dire que nous pouvons faire plusieurs choses à la fois ? Non, notre cerveau peut percevoir plusieurs choses simultanément, mais il ne livre à notre conscient, et de manière successive, que ce que nous avons sollicité par notre attention. C’est par le canal de notre attention que le cerveau porte à notre conscience les éléments dont nous avons besoin et ce tous les 400 millièmes de seconde, après analyse de leur pertinence.
Mais ce n’est pas tout. N’oublions jamais que notre cerveau choisira toujours en priorité de préserver notre intégrité physique. Un mouvement inattendu dans notre champ visuel, un son qui tranche sur le fond ambiant doivent être immédiatement analysés pour savoir s’ils annoncent ou non un danger.
Voilà pourquoi au golf nous sommes gênés si à certains moments un évènement sonore ou visuel vient détourner notre attention.
Si le mode automatique de l’attention est inconscient, il reste essentiel. Nous avons même intérêt à laisser au mode automatique tout ce qui est routinier et à réserver nos ressources attentionnelles, qui ne sont pas illimitées, pour des tâches singulières en relation avec le moment présent.
Prenons un exemple. Au putting, le swing est tout ce qu’il y a de plus dépouillé. Laissons le aux automatismes et consacrons notre attention toute entière aux trois paramètres qu’il faut obligatoirement maîtriser sur chaque putt : la ligne de putt, l’alignement de la face de club et la vitesse à donner à la balle. Sur tous ces points nous attendons de notre cerveau qu’il livre des informations précises à notre conscience.
Vous pouvez sans peine trouver d’autres exemples et tracer la limite entre attention automatique et attention consciente.
Quelque part nous retrouvons ici la différence entre l’entraînement au practice et le jeu sur le parcours. Quand nous apprenons ou révisons au practice nous centrons notre attention sur les gestes à acquérir. Sur le parcours concentrons nous sur ce qui va permettre de scorer.
Vous l’avez deviné l’attention ne fonctionne pas toute seule, elle fait appel à la mémoire. Les allers-retours entre l’attention automatique ou consciente, la mémoire perceptive, la mémoire procédurale et la mémoire de travail doivent fonctionner à plein régime aussi bien lors de notre routine que quand nous swinguons (voir l’article sur la mémoire humaine et ses cinq systèmes).
Quand nous swinguons l’idéal étant de laisser la place aux automatismes : attention automatique et mémoire procédurale inconsciente. Faisons nôtre la phrase de Percy Boomer que j’aime à citer : « un golf régulier dépend de notre capacité à interdire l’accès de notre machinerie mentale à la part de nous-même qui joue les coups de golf « .
La perception, ouverture sur le monde
Alors qui décide des informations qui seront mises à disposition de notre conscience ? Nous bien sûr, par le canal de notre attention ! Est-il facile de concentrer notre attention sur un point précis, voire successivement sur plusieurs points ? Pas si sûr ! En plus nous ne disposons pas tous des mêmes capacités d’attention. Et il existe tant de choses qui peuvent détourner notre attention. Sans compter sur notre pensée qui peut facilement nous distraire. (Voir l’article « Jouer au golf dans le moment présent« )
Qui permet à notre attention de se centrer sur un objet ? Nos sens, nos facultés de perception sensorielle qui fournissent les informations immédiates qui parviennent à notre conscience par paquets, sous forme d’images finies tous les 400 millièmes de seconde.
Parmi ces sens la vue et l’ouïe sont les principaux pourvoyeurs d’informations.
L’œil rappelons le (voir l’article sur la vision humaine) dispose de deux modes de fonctionnement :
– le mode global ou rétinien
– le mode ponctuel ou fovéal. La fovéa étant la zone de la rétine où la vision des détails est la plus précise.
Ce dernier mode nous permet de concentrer notre attention sur un point précis. Pour nous golfeurs c’est notre focus : le pied du drapeau, un point du green où nous voulons faire tomber la balle pour qu’elle roule vers le trou, c’est au putting le point du bord trou où nous voulons faire entrer la balle.
Il est d’usage de considérer qu’il faut regarder ce focus pendant 6 secondes consécutives pour en apprécier la direction et la distance, et bien le mémoriser.
Pour l’ouïe on parle :
– d’effet cocktail quand on est capable de distinguer un son particulier dans une ambiance sonore
– d’effet banquet quand cette ambiance sonore est si confuse qu’il n’est plus possible d’y distinguer quoi que ce soit.
Mais l’ouie a moins d’importance au golf si ce n’est pour provoquer des « détourneurs » d’attention. Toutefois un bruit régulier et identifiable, comme les avions au Golf National, se contente de générer une fatigue certaine sans détourner l’attention.
Conscience, attention, perception
Il semble évident que dans l’ensemble « conscience-attention-perception », l’attention tient une place centrale. Elle est le moteur :
– elle « joue » avec nos sens et les pousse à s’intéresser exclusivement à tel ou tel objet, si toutefois notre cerveau ne prend pas spontanément les commandes pour cause de danger potentiel. Si un papillon ne vient pas se poser sur notre balle au moment de lancer le backswing ! Ou si notre pensée ne nous pousse pas à l’évasion vers un ailleurs sans issu à ce moment précis…
– elle oriente le choix des informations qui après traitement inconscient seront portée à notre conscience.
Pouvons-nous éduquer notre attention ? La plupart des méthodes existantes concernent l’éducation des enfants et particulièrement des enfants hyperactifs.
Dans son livre « J’aide mon enfant à mieux apprendre » Bruno Hourst (un ancien marin devenu pilote d’hélicoptère puis enseignant) avance un certain nombre de propositions pratiques que je résumerais librement ainsi :
– pratiquer une activité d’introspection pour se recentrer sur soi afin de mieux se connaître et ouvrir ses sens à l’extérieur (je pense à la méditation) ;
– pratiquer des activités physiques de concentration comme le yoga, le Qi Gong, la relaxation (nous restons proche de la méditation) ;
– pratiquer des activités ludiques méticuleuses comme le dessin…
– boire de l’eau ! Boisson absolument indispensable au bon fonctionnement de nos neurones…
Bref tout ce qui permet de centrer son attention et de la tenir mobilisée sur la longueur.
Dans l’article « Jouer au golf dans le moment présent » j’attirais votre attention (justement) sur une petite appli pour nos smartphones et tablettes : « Méditer avec Christophe André » (à trouver sur Google Play ou sur App Store).
C’est un excellent outil pour découvrir et pratiquer la méditation.