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131 – Je ne vois pas bien une balle de golf rouge

Temps de lecture estimé 6 minutes

La mode est aux balles de couleur ! Quasiment toutes les marques ont leur collection de balles colorées. Parmi elles certaines arborent un rouge profond magnifique. Hélas sur les fairways nous avons bien du mal à retrouver une balle de golf rouge ! Dans un rough bien gras n’en parlons même pas.
Pour comprendre ce phénomène il est nécessaire d’explorer notre rapport à la couleur.
Comment percevons-nous les couleurs ? Comment sommes-nous équipés pour « voir » les couleurs ?

Il faut tout d’abord se persuader d’une chose incroyable : les couleurs n’existent pas ! Ce sont des sensations. Les couleurs n’existent que dans notre cerveau où elles sont crées par un appareillage complexe : le système visuel humain.

Le système visuel humain est l’ensemble des organes participant à la perception visuelle humaine. Il est principalement constitué de l’œil, des nerfs optiques, du chiasma optique, du tractus optique, du corps genouillé latéral, des axones issus de certains neurones et du cortex visuel.

En fait, les couleurs ne sont que la traduction sensorielle de la partie visible du spectre électromagnétique que nous appelons couramment la lumière. La couleur est le codage d’une information lumineuse perçue par notre appareil visuel.

Désolé mais le monde n’est pas coloré. Comment est-il vraiment ? Nul ne sait. Peut-être un mélange de gris, comme une photographie en « noir et blanc » ? Mais ce n’est qu’une hypothèse qui reste invérifiable.

Le spectre électromagnétique

Le spectre électromagnétique est le classement par longueur d’onde des rayonnements qui composent la lumière. Par définition ce spectre est infini et s’étend sans rupture de 0 à l’infini.

Dans ce spectre une toute petite partie est visible par l’oeil humain. Cette partie se situe dans les longueurs d’onde allant, selon les individus, de 400 à 800 nanomètres (nm).

Nos yeux « traduisent » ces longueurs d’onde en un spectre coloré allant du bleu-violet (400 nm) au rouge (800 nm). 

Comment l’oeil est-il équipé pour traduire des longueurs d’onde en sensations colorées ?

Les cônes et les bâtonnets ! Vous vous souvenez ? Alors je ne vous refais pas le cours de SVT.

Donc sur notre rétine deux types de cellules, les cônes et les bâtonnets.

Shéma de l’oeil

Les cônes codent pour les couleurs, les bâtonnets sont responsables de la vision nocturne, car très sensibles à la lumière de basse intensité. À la lumière du jour les bâtonnets sont aveugles.

Trois sortes de cônes se côtoient sur la rétine. Certains sensibles aux longueurs d’onde basses sont nommés cônes B (bleu), d’autres sensibles aux longueurs d’onde médianes sont appelés cônes V (vert) et d’autres enfin, les cônes R (rouge) sont sensibles aux grandes longueurs d’onde.

Les anglo-saxons, comme dans le schéma ci-dessous, utilisent une autre nomenclature. Les cônes B sont nommés cônes S (short), les cônes V, deviennent M (medium) et les cônes R sont dits L (long).

Avec cet appareillage nous sommes capables de distinguer environ 300 000 nuances de couleurs.

Notons que :

  • les cônes S sont bien centrés sur les longueurs d’onde correspondant au bleu.
  • les cônes M sont centrés sur le vert mais débordent largement sur le bleu et le rouge.
  • les cônes L sont centrés sur le jaune, et à cheval sur le vert et le rouge.

Ainsi les cônes verts et rouges perçoivent de nombreuses couleurs en commun.

Donc notre balle de golf rouge aura toutes les chances d’être perçues à la fois par des cônes verts et des cônes rouges et ne sera pas facilement distinguable sur le gazon des fairways.

Deux couleurs dont les longueurs d’onde sont différentes mais que l’oeil humain a du mal à différencier sont dites métamères. Dans certaines conditions d’éclairement, ce peut-être le cas du rouge et du vert.

Les couleurs sont relatives

Mais le chevauchement des sensibilités des cônes ne suffit pas à expliquer que les balles rouges puissent être difficiles à distinguer. Il faut en effet tenir compte de deux facteurs de relativité :
– les capacités visuelles de chacun
– l’environnement.

Sans parler de particularismes comme le daltonisme, il existe de nombreuses disparités entre individus. Par exemple, la densité des cônes verts par rapport aux rouges peut se révéler très différente d’un individu à l’autre dans un rapport qui varie de 0,1 à 16. 

Et nous n’entrerons pas dans le fait que les hommes et les femmes voient les couleurs différemment ! Par exemple les hommes voient les tomates plus orangées que les femmes.

Enfin chaque couleur a un impact bien particulier sur une autre couleur placée dans son environnement.
Voici un exemple simple. La couleur du V de ces deux images ci-dessous est la même. À gauche dans un environnement vert, le V paraît bleu, à droite dans un environnement bleu, il parait vert.

© CRDP Poitiers
© CRDP Poitiers

Notre balle rouge se distinguerait peut-être mieux sur un fond bleu que sur un fond vert ?

La valeur des couleurs.

Il reste un paramètre à explorer. La valeur d’une couleur désigne son degré de clarté ou d’obscurité. Chaque couleur possède une valeur qui lui est propre.

Le noir et le blanc sont les limites. Le nombre des valeurs est infini entre ces deux limites.

Pour visualiser la valeur d’une couleur rien de mieux qu’une « traduction » en noir et blanc. Et il apparaît à l’évidence que notre belle balle rouge a bien du mal à s’affirmer sur un gazon vert.

Red golf ball on golf course with mini golf stick
Red golf ball on golf course with mini golf stick

À l’évidence la « valeur » d’une balle de golf rouge ne tranche pas sur la « valeur » du fond vert.


Le jaune s’affirme nettement comme la couleur dont la valeur est la plus claire.

Le tennis a fait son choix depuis plus de 40 ans, même si les balles blanches sont toujours autorisées en tournoi.

Que conclure ?

Que retenir au final ? Que je distingue mal une balle rouge sur le vert du parcours. Suis-je le seul ? Peut-être pas si j’en crois mes partenaires de jeu quand ils m’aident à chercher mes balles…

Il nous reste deux certitudes, les balles blanches et jaunes sont les plus visibles. Mais il faut essayer d’autres couleurs comme le rose clair. Il est presque certain que les couleurs « sombres » se verront moins bien.

Et pour finir : choisissez la couleur qui vous plaît !

Cet article ne prétend pas faire le tour de la façon donc l’espèce humaine perçoit les couleurs. Il est très vulgarisé et donc pas toujours très précis. Il veut juste nous faire comprendre pourquoi les belles balles rouges qui nous sont proposées ne sont pas très visibles sur les fairways. Il reste beaucoup de choses à dire sur la perception des couleurs.


Si le sujet vous passionne faites connaissance sur YouTube avec Michel Pastoureau historien, spécialiste des couleurs.
Ci-dessous une vidéo sur l’histoire de la couleur bleue (1 heure 20 min quand même).

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